Gauthier Sibillat

Dans Ecce Homo, Nietzsche écrit: « ne prêter foi à aucune pensée qui ne soit soit pas née au grand air, pendant que l’on prend librement du mouvement ».
J’aurais tendance à penser la même chose en matière de photographie.

Gretel Weyer

Gretel Weyer fouille les symboles et les objets de l’enfance. Les œuvres matérialisent les peurs, les fascinations et les rêveries qui structurent ce qui est communément appelé « l’âge tendre ». Une tendresse que l’artiste vient fendre d’un malaise. L’innocence et la nostalgie laissent place au doute et à l’abandon. D’un seau s’échappent des crapauds, la fuite des princes charmants ? Sur et autour d’un banc traînent des masques animaliers : un loup, un élan, un putois et un ours. Les animaux, attachés à l’imagerie du conte, sont à la fois séduisants et effrayants. Les masques semblent avoir été abandonnés, la scène indique la fin du jeu. Sur des toiles de canevas, l’artiste brode des femmes endormies. Le sommeil se confond avec la mort. Elle travaille ainsi les notions de passages et de rituels auxquels les enfants sont confrontés de manière consciente ou inconsciente. L’humain et l’animal cohabitent de manière fragmentaire. La tête d’un garçonnet regarde le corps d’un oiseau mort. Des petites mains en céramique blanche sont introduites dans les gueules d’un loup, d’un ours, d’un cheval ou d’un cerf. À la lisière de deux mondes, elle fait dialoguer le danger et la bienveillance.

Un sentiment d’inquiétante étrangeté plane au-dessus de l’exposition où le temps est comme suspendu. 

Les sculptures de Gretel Weyer génèrent une transfiguration du réel par l’imaginaire. Par le détachement ou le saisissement, l’artistes parvient à ouvrir des espaces narratifs où les imaginaires (personnels et collectifs) peuvent à la fois s’exprimer et se réfugier.

Extrait de texte de Julie Crenn écrit dans le cadre de l’exposition des illusions, à la galerie Maïa Muller-Paris.

Clara Denidet

Clara Denidet
Née en 1991, en Bourgogne, vit et travaille à Strasbourg.

L’intérêt que je porte à ce que l’objet dit, m’enseigne des choses.
C’est une forme d’attention décentrée qui s’applique à débusquer cette capacité de
«faire avec». Loin de l’issue résignée, l’acte de composer, de bricoler tient du magique*.

Quand il est employé à faire ce pourquoi il n’a pas été prévu, à être ce qu’il n’est pas,
quand il devient un symbole, un outil, un langage ou un témoin, quand il est transmis, usé, transformé, l’objet est une prise.
Se pencher sur l’objet est une manière discrète d’étudier ses usagers. Chacun déploie face au chaos une foule de tactiques quotidiennes, habitudes et rites qui fondent nos manières d’habiter un environnement.
(La construction d’une charpente solide comprend le fait de «toucher du bois».)

Mon travail tient autant de la recherche anthropologique que du bricolage empiriste.
Je cherche dans la cohabitation de ces deux terrains des accès à ces savoirs internes et collectifs, ceux qui se logent dans l’usage de la langue, de l’objet, du quotidien… Ceux qui s’apprennent et se fabriquent.
Tout ça demande un effort d’attention, d’indiscrétion. L’œil cherche sans cesse le reflet d’une chose dans une autre, mise sur l’indice, navigue de la marge au centre. Le monde ordinaire, la micro-histoire deviennent par là des terrains de recherche où l’intuition se ferait outil de mesure, l’art une science inexacte.
Il s’agit aussi de présumer des liens entre les choses, de parier sur leurs échos comme
on s’essayerait à jeter des sorts.

Élisa Martin

Ma pratique s’oriente largement vers la peinture et le dessin, le rapport à l’espace, à la mise en scène, aux objets est en permanence sous -jacent et questionne le vaste thème du paysage.

Jean-Baptiste Defrance

La peinture de Jean-Baptiste Defrance est un effort utopique toujours manqué, toujours recommencé, de se dire : de dire la vérité sur lui-même. Les formes qui remontent par transparence de sous les couches supérieures de peinture sont le résidu d’un combat livré à la disparition, à la mort, à l’oubli, à l’impossibilité de dire.
Chaque tableau peut être regardé comme un agencement d’évocations autobiographiques, où la multiplicité d’affects attachés à chaque objet jouerait avec ceux inscrits dans tous les autres, y compris ceux qui ne sont pas représentés sur la toile. La juxtaposition de détails réalistes et de zones plus floues traduit la texture inconstante des souvenirs, tantôt limpides, tantôt vagues, tantôt reconstruits.
Les contaminations, les imitations, les brisures, les coulures qui, de manière toujours neuve, agencent ces formes, ne craignent pas de contredire certains clichés normatifs de la psychanalyse. La révélation d’un inconscient y compte bien moins, en effet, que la répétition pulsionnelle d’un double geste d’obturation et de dévoilement.
Jean-Baptiste Defrance pourrait dire, comme Dado, que ses tableaux en contiennent dix autres : patiemment recommencés, recouverts à la tempera comme l’oubli recouvre les souvenirs dont émerge soudain une zone plus claire, alors rehaussée et rendue brillante par un mélange d’huile de lin. Avec la peinture surréaliste, son oeuvre a en commun de prendre pour objet le fonctionnement de sa propre pensée, confrontant le regardeur à des questions essentielles. Comment la pensée se pose-t-elle sur un objet ? Quel rapport entretenons-nous à ce que nous regardons, et en quoi notre regard informe-t-il le rapport que nous entretenons avec nous-même, avec notre propre vie ? » […]
Extrait du texte de L. Perez

Serge Lhermitte

Né en 1970, Serge Lhermitte vit et travaille à Saint-Ouen et Strasbourg.
Pratiquant une forme quasi sociologique de l’art, Serge Lhermitte explore et analyse l’impact essentiel de phénomènes sociaux tels que le travail salarié, les retraites, la réduction du temps de travail, mais aussi l’architecture, l’urbanisme et les mutations urbaines sur la construction de nos identités, dans l’élaboration de nos subjectivités, dans l’information de nos êtres au monde. Il propose des images réflexives, où les espaces privés et publics se replient l’un sur l’autre. Si dans son travail il tourne le dos à une photographie documentaire, il tient aussi à se démarquer d’une photographie plasticienne dans sa mise en exposition.
Serge Lhermitte invente pour chaque série un protocole particulier, un cadrage et un mode spécifique de monstration, l’artiste crée des images frappantes, à la fois évidentes et complexes, directes et énigmatiques. Une esthétique hybride qui articule deux dimensions apparemment antinomiques : symbolique et réaliste.

Gloria Keller

La cire, le sel, la craie, la terre et les pigments sont seulement quelques-uns des matériaux que Gloria Keller utilise dans son travail. On y retrouve souvent une référence au pays d’origine de l’artiste qui est née à Barcelone – par exemple quand elle applique de la terre rouge ou des fleurs de l’Espagne sur la toile. Les couches de différents matériaux donnent aux toiles un effet presque plastique.
Beaucoup de ses peintures ont un sujet: un poème ou un thème actuel. Mais le travail de Gloria KELLER ne se résume pas à de simples illustrations. Mais à la manière associative dont l’artiste travaille avec les couleurs, les matériaux et les formes.

Patrick Bastardoz

Depuis quelques années je jette un regard actif vers la peinture du siècle d’or hollandais, je m’en nourris dans mes diverses séries sur les musées, vitrines d’antiquaires et paysages urbains. Les mois passés marquent également un retour vers l’univers industriel avec lequel je n’ai pas encore réglé tous mes comptes.

Martyn Symons

Martyn Symons est né dans une petite ville de pêcheurs dans le comté d’Essex, sur la côte Est de l’Angleterre ; il est diplômé de la renommée école d’Art & Dessin « Inchbald » à Londres.

Il se consacre depuis dix ans à la peinture et à la photographie. Ses œuvres révèlent notamment la plénitude et la sérénité des paysages de la nature anglaise, l’intimité des intérieurs silencieux des grandes maisons londoniennes, les rapports de l’humain à la cité moderne et à l’image.

Martyn Symons a notamment exposé à Strasbourg et Ostwald, à Leigh-on-sea en Angleterre ainsi qu’au Waterman Arts Centre à Londres. Avant de se consacrer pleinement à son art, il fut architecte d’intérieur & décorateur, il a travaillé sur de nombreux projets de restauration de maisons anciennes à Londres, et de décors à la BBC.

Il prépare actuellement sa prochaine exposition au Palais du Conseil de l’Europe.

Pierre Soignon

Un déplacement, le voyage dans le temps et l’espace, des lieux chargés d’une histoire, des figures humaines animales, mythiques, les traces de notre histoire, un rébus.
Un personnage, un archétype, un motif, un prétexte, le leitmotiv qui structure mes iconographies. Il est le vecteur entre moi et ce qui m’entoure tout en étant par lui-même signifiant.
Ces artefacts témoignent d’un cheminement, comme un journal intime qui essaie de donner des pistes pour une autre lecture de l’image.
Depuis 2001 Pierre Soignon collabore avec son personnage et visite des paysages et quelques lieux d’expositions à Nancy, Metz, Strasbourg, Freiburg, Basel, Mulhouse, Belfort, Besançon, Bédoin, Les Arques, Toulouse…